27 septembre 2011

Ce mardi 27 septembre, journée à haut risque à Conakry


Auto-route à Madina

Sur l’invitation du Premier Ministre, les acteurs de la politique guinéenne se sont concertés hier lundi. Il fallait impérativement convaincre le Collectif à renoncer aux manifestations qu’il organise à partir de ce mardi jusqu’à la satisfaction totale de leurs revendications. Mais hélas ! Le pouvoir et l’opposition se sont séparés à queue de poisson.


La conséquence est que cette semaine sera une semaine à haut risque. Le Collectif campe sur sa position de descendre dans la rue. Cette nuit, à partir de 23h déjà, les barrages se sont multipliés à travers la ville. Les pick-up remplis de gendarmes et de policiers quittaient le centre ville pour rejoindre la banlieue. J’ai également été surpris de constater que tous les militaires, y compris les hauts cadres de l’administration militaire, ont passé la nuit dans les camps et non en famille. C’est l’ordre donné par le Général Souleymane Kèlèfa Diallo, chef d’Etat Major Général des armées.
Maintenant, la question est de savoir ce que cette journée nous réservera. Les militants du Collectif sortiront-ils pour manifester ? Je l’ignore pour le moment. La plupart des boutiques sont fermées au  grand marché Madina, les stations d’essence sont fermées dans certains endroits et les rues presque désertes. A Kaloum, au cœur de l’administration, beaucoup de travailleurs n’ont pas pu se rejoindre le travail même si les banques restent ouvertes.  

Suis-je pour ou contre ces manifestations ?

 Je tiens au respect scrupuleux de la constitution qui consacre le droit de manifester sans pourtant ignorer que celui-ci est assorti de certaines conditions. L’exercice de ce droit et le respect des conditions qui s’y attachent sont des composantes essentielles de la démocratie.
Mais en tenant compte d’un des problèmes épineux de notre pays, je juge ces manifestations inopportunes. Ce n’est pas seulement en raison de la fragilité de notre situation sociopolitique. Car, celle-ci ne saurait être un argument valable s’il s’est avéré que le pouvoir prend des décisions unilatérales en ce qui concerne l’organisation des élections législatives.
 Ce problème épineux dont je veux parler, c’est la difficile et nécessaire question de Réconciliation Nationale. Je trouve simplement que le collectif a une mauvaise intention que beaucoup d’observateurs ignorent ou négligent. Ils veulent mettre le bâton dans les roues de la Commission de Réflexion sur la Réconciliation Nationale. Le Collectif a beaucoup de réserves quant à la démarche de cette commission crée le 24 juin 2011 par un décret présidentiel. Il y a quelques semaines de cela, la commission a fait une importante déclaration dans laquelle elle a décrété ce 28 septembre  comme «  Journée de Pardon à Dieu ». Il faut rappeler que le 28 septembre est devenue une date de gloire et de tragédie. Le 28 septembre 1958 les guinéens ont voté NON à la colonisation française pour devenir indépendante. A la même date du 28 septembre 2009, une manifestation pacifique contre la junte dirigée par le capitaine Dadis a été réprimée dans le sang. Donc la Commission de Réflexion sur la Réconciliation souhaite commencer son travail à cette même date.

Alors, le choix des mots « … manifestations publiques pacifiques à partir du 27 septembre…. » qui figure dans la déclaration du Collectif est loin d’être anodin. Le premier effet immédiat d’un tel choix est le sabotage  de l’initiative annoncée par cette commission présidée par El hadj Mamadou Saliou Camara (premier Imam de la grande mosquée de Conakry) et Monseigneur Vincent Coulibaly (grand archevêque de Conakry).

Le collectif réussira-t-il à saboter le processus de réconciliation engagé par la commission de réflexion ?

Je réponds d’emblée oui ! Ce premier coup d’essai est un coup de maitre. Aujourd’hui, personne ne parle de « Journée de Pardon ». On parle plutôt de manifestation. Alors, puisque ces manifestations se prolongeront au 28 septembre -en tout cas jusqu’à la satisfaction des revendications des manifestants- nous saurons nettement ce que pense le collectif de cette initiative prise par les personnalités religieuses les plus respectées de la Guinée.

 Le Collectif suspendra t-il la manifestation du 28 septembre pour affirmer son soutien aux efforts de réconciliation ? Nous verrons bien ! Mais une chose reste claire : la Commission de Réflexion sur la Réconciliation est durement éprouvée par ces mouvements!   

Je reste impatient de voir comment le Collectif réagira à cette « Journée de Pardon à Dieu » et la façon dont la Commission de Réflexion sur la Réconciliation Nationale réussira à donner un sens à son initiative.